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C’est l’enclos ou je garde les idées d’histoires capturées et plus ou moins apprivoisées

L’esprit du vent

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Voilà un bout de temps que je n’ai rien publié.

Il s’agit d’un texte de nouvelle.

Une idée qui me taraudait depuis quelques années. Une sorte de défis. Saurais-je capable d’imaginer une histoire à partir d’un thème invraisemblable, digne de Quentin Dupieux : un homme se transformant en courant d’air.

Combien de parti-pris, d’angles différents ai-je abordés, abandonnés, repris, détournés pour arriver à ce texte? Finalement, certainement à cause des circonstances, au fil des années ( les premier essais date de plus de 4 ans) il est devenu une réflexion sur le deuil.

La première version faisait plus de 26000 caractères. Puis j’ai voulu placer ce texte pour un concours dont le thème pouvait correspondre. Je l’ai réduit à moins de 10000 caractères.

Est-ce cette réduction drastique ou le sujet extravaguant? Ce texte reste bancal, prétentieux même, bref : insatisfaisant. Mais c’est fait, je peux passer à autre chose.

L’ESPRIT DU VENT

La mémoire, pour certains, est semblable à un disque dur où le passé est classé en dossiers facilement identifiables et manipulables. Les épisodes douloureux sont ainsi relégués tels des spams dans une inconsciente poubelle. Rien de tel pour moi. Mes souvenirs surgissent, bons ou mauvais, comme ces feuilles flétries que le vent tourmente sur le marbre de ton tombeau, cher oncle. Car le vent fut ton obsession, tu lui sacrifias ta vie, tu lui dédias ta mort. Comprendrai-je, un jour, cette funeste folie ?

Je me souviens parfaitement de notre dernière rencontre au printemps dernier. Tu m’avais convié, pour un court séjour, dans un palace désuet en bordure du lac de Côme où tu aimais te reposer. Ta dernière cure avait été profitable, tu semblais avoir repris du poids et recouvré cette excentricité télégénique que chacun admirait.

Nous dînions sur la terrasse de l’hôtel à la lumière d’un soleil finissant. Nous avions consacré notre journée à visiter quelques églises baroques et j’appréciais tes commentaires érudits sur ce style très répandu en Lombardie.

« Beaucoup se lassent du baroque, trop de fioritures, d’exubérance… Mais se rendent-ils compte du miracle ? Comment cet art emporte l’immuable, souffle le vital dans la rigidité de l’inerte. Laisse toi aspirer par le baroque, Basile, dépouille-toi de ta conscience et ne t’effraie pas de ses tempêtes ! »

Puis semblant trouver une inspiration dans l’atmosphère irréelle que le crépuscule donnait au parc de l’hôtel, tu poursuivis :

— Vois-tu, Basile, il est temps que j’aboutisse l’œuvre de ma vie. ,

— Tu écris donc tes mémoires, mon oncle. C’est une bonne chose. Nous sommes nombreux à vouloir connaître celui qui se cache derrière l’homme public que tu es.

— Que j’étais, Basile, que j’étais… Mais des mémoires, enfin, quelle idée ! Les mémoires ne révèlent pas grand chose sinon quelque narcissisme… Elles ne sont qu’un masque de plus…Toi, qui autrefois, aimais tant souffler des bulles de savon, tu devrais savoir que derrière les paillettes il n’y a que du vent…

Je n’en sus pas davantage sur cette œuvre à achever. Mais l’épisode de mon enfance que tu me rappelais était un moment de bonheur pur, comme toi seul savais en faire surgir.

Tu m’avais offert un set pour faire des bulles de savon. C’était juste un anneau que nous trempions dans un petit réservoir rempli d’eau savonneuse et à travers lequel nous soufflions. J’entends encore tes commentaires exaltés :

— Ce n’est pas simplement du savon qui s’envole, Basile, c’est toi !

— Moi, mon oncle ?

— Pas toi tout entier, bien sûr, mais c’est toi quand même. L’air que tu as soufflé dans la bulle a tourné dans tes poumons. Il emporte un peu de ta chaleur dans les airs.

— Oh ! La bulle a crevé. Tu es libéré, Basile ! Le vent t’emporte pour un long voyage, quelle chance !

Cette grande œuvre je n’ai pas su la voir. Pourtant, maintenant, je me rends compte que j’en ai été le témoin. Un témoin aveugle, un témoin effaré devant les dérives psychiques qu’elle impliquait.

N’étaient-ce pas les prémices d’un trouble mental que je décelais lorsque nous visitions le C.E.R.N ?

Au grand regret de nombreux téléspectateurs, tu avais abandonné tes chroniques météo quotidiennes pour présenter des émissions de vulgarisation scientifique. Je devais te rejoindre à Genève pour visiter le Conseil Européen pour la Recherche Nucléaire. Tu avais besoin d’un regard « naïf » pour préparer une de tes nouvelles émissions.

« Nous sommes une illusion, Basile, disais-tu pour me décider. Tu comprendras là bas. La matière visible de l’univers ne représente que quatre pour cent de sa masse ! Que sommes nous, finalement ? Juste du vide autour de particules. Nous sommes aussi abstraits que les images pixelisées de nos écrans. »

On nous avait guidé, à 100 m sous la terre, le long du gigantesque accélérateur de particules, nous expliquant les découvertes fondamentales que ce titanesque anneau avait révélées. Je n’avais que de fragiles connaissances en sciences physiques et mes interrogations permettaient d’anticiper les questions des téléspectateurs.

Nous avons déambulé dans un dédale de structures colorées. Tu notais mes questions et repérais les dispositifs les plus efficaces pour mettre en scène la démesure des infrastructures et l’ambition exceptionnelle du projet. Puis, après avoir pris congé de nos accompagnateurs et programmé le tournage à venir, nous avons rejoint le taxi qui devait nous conduire à Genève.

Un vent fort nous surprit sur le parking. Tu t’éloignas du véhicule qui nous attendait, fis quelques pas face au vent et t’immobilisas devant une étendue de champs en bordure du site. Tu fermais les yeux, comme pour un geste amoureux, respirant l’air vif en longues goulées.

Comme je te rejoignais, tu me confias :

« Ce vent, c’est la Vaudaire. Il est est fort et chaud. Sais-tu pourquoi on donne des noms aux vents ? C’est parce que ce sont des êtres vivants, Basile ! Ils se nourrissent d’eau, de chaleur, naissent et meurent peut-être. Imagine que nous puissions modifier la force qui nous inflige cette forme humaine et nous éparpiller au vent, nous étirer entre les vallées, jouer avec les ailes des oiseaux, rider les surfaces des lacs, déchaîner les tempêtes ! Ha, Basile, quelle misère que notre infirmité humaine ! »

J’assimilais cette obsession éolienne à une excentricité poétique. Mais elle était le symptôme d’un projet maladif que tu construisais méthodiquement, avec une persévérance obstinée. Ton œuvre dictait ta carrière, épuisait ta santé car c’est avec de multiples drogues que tu l’édifiais ensuite.

Je te revois, recroquevillé sur un mauvais fauteuil, devant la balustrade bordant la terrasse de l’établissement de cure. Une couverture te préservait de la fraîcheur des rafales et dissimulait la maigreur de ton corps

Tu insistais pour rester ainsi face au vent.

— J’ai une conscience professionnelle aiguë, ironisais-tu. J’ai dû expérimenter ce que je filmais pour mes émissions consacrées à l’ethnologie. Je me suis laissé happé, voilà tout. Ha ! Le goût de l‘ayahuasca de mon ami Piripkura … C’est si facile de se laisser emporter.

— Le corps n’est pas un jouet, mon oncle.

— Le corps n’est pas grand chose, tu le sais bien … Juste du vide et quelques particules. Je crois que tous les junkies cherchent cela. La dispersion de nos molécules… Mais les psychotropes n’offrent qu’une illusion! On reste spectateur, aux portes de la perception… Alors que si nous étions juste un élément, une montagne, un fleuve, un vent… Les vents ont une vie bien différente, oh oui ! C’est autre chose que la vie des vents !

J’étais atterré. Les toxines n’avaient pas seulement altéré ton état physique, mais avaient amplifié tes délires. Tu remarquas ma consternation.

— Te souviens-tu de notre visite au C.E.R.N ? Cette débauche d’intelligence, d’argent! Quelle erreur là aussi, Basile! On cherche à l’extérieur ce que nous avons en nous. Nous sommes l’univers. Il suffit d’entrer en nous même pour côtoyer les particules qui nous constituent. Au moins les pratiques magiques m’ont appris cela. J’ai failli en crever mais à ce stade ça ne veut rien dire…

Je n’étais plus l’enfant qui partageais tes extravagances, mon oncle, alors, dans un soupir résigné, tu continuas :

— Il n’y a pas de vide, ça n’existe pas, Basile, nous l’occupons… Nous l’occupons entièrement…

Pourtant ce vide, je l’ai vu. Aux limites de l’épouvante, je l’ai approché. C’était ton œuvre. Je le sais maintenant. Je ne peux plus ensevelir l’horreur de ce contact.

Cela se produisit entre deux internements – Combien de fois as-tu rechuté, mon oncle ?

Tu ne répondais pas à mes appels. Je me rendis chez toi et te trouvai allongé sur ton lit semblable à un gisant tant la pâleur de ta peau se confondait avec celle des draps. Bouleversé, j’ai saisi ton poignet, espérant un signe de vie. Il était si léger !

Je remarquai un bol sur le chevet. Un reste de liquide brunâtre en tapissait le fond. Je reconnus l’ayahuasca que tu m’avais décrit. J’écartai une de tes paupières et alors je la vis. C’était ton œuvre. L’orbite s’ouvrait comme un puits sur un espace insondable, infini, vertigineux, un vide sidéral. Je reculai d’effrois, puis je perçus une infime pulsation. Tu vivais. Une pupille largement dilatée comblait maintenant la béance orbitaire. J’attribuais l’épouvantable vision à la confusion de mon esprit. Mais je me trompais, j’avais été le témoin de ton œuvre inimaginable : ta transfiguration.

Pourtant ce n’était qu’une ébauche car, plus tard, tu laissas un message déconcertant sur mon répondeur :

« Ah, Basile, toujours injoignable ! Dommage ! Mais tu dois savoir ! J’y suis enfin parvenu. J’ai investi le vide des atomes, je l’ai imprégné de ma conscience. J’ai maîtrisé la force gravitationnelle de leurs particules. Ha ! Pas besoin de technologies sophistiquées, notre énergie mentale est tellement plus forte. Mes amis chamans le savent, mais ils ignorent la physique quantique, ils ne savent pas ou diriger leur esprit. Pendant quelques secondes, mes particules élémentaires se sont mêlées à d’autres. J’étais l’oxygène, l’hélium, j’habitais l’air en toute conscience, Basile, en toute conscience ! Il n’y a pas de vide, je te l’ai dit, nous pouvons habiter sa substance, je l’ai fait. Pendant un instant, Basile, j’étais le vent !»

Je te téléphonais peu après, m’inquiétant de ton état. Tu fis passer ce message pour une sorte de plaisanterie et inventas je ne sais quel prétexte pour en disqualifier le contenu. Mais tu ajoutas :

« Sais-tu que le mot esprit vient du latin spiritus qui signifie « souffle, vent,». À notre dernier souffle, on rendra l’esprit… Mais où se rendra t-il ? »

Une rafale balaye les feuilles jonchant le marbre du tombeau. Certaines sont emportées dans les airs comme des bulles de savon.

Ce vent, mon oncle, et si c’était toi… ?

Bon, bien sur, je n’ai pas gagné le concours.

VIRTUELLE RANDONNÉE

Presque 3 mois sans publication. Je n’ai plus d’atelier donc c’est moins facile. En inventoriant mes BD brûlés, j’ ai redécouvert une dédicace de Franquin sur un album de Spirou  » à mon confrère dessinateur ». J’avais entre 14 et16ans, qu’est devenu ce jeune dessinateur? Je crois qu’il a toujours été là, endormi. Alors, il s’est réveillé et il m’a dit : « Fait ça pour moi, s’il te plait. » Ça, c’était une BD, comme j’aurai aimé la faire à l’époque. J’ai donc repris ce que j’avais sous la main. Que donnerait cette histoire si elle était vraiment mise en forme. Juste pour savoir la passion de mon adolescence perdure. Juste le début pour voir ce que ça pourrait donner. Et pas besoin de place pour dessiner… Alors voilà

Virtuelle randonnée : l’intégrale

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Il fallait que toute cette aventure narrative soit rassemblée. Je constate une certaine évolution dans le dessin, mais dans l’ensemble ça n’a pas trop bougé. A part pour le personnage de la vierge que je n’ai pas réussi à fixer. A la lecture de l’ensemble, on aurait envie que certaines lacunes soient comblées, que les enjeux soient mieux définis, que l’intervention des commentaires off soient mieux gérées. Mais c’est le risque de ce type d’entreprise. Il y a l’imagineur qui raconte son histoire sans se préoccuper de grand chose, et puis, il y a l’auteur, celui qui qui reprend toute cette matière et qui en fait une bonne histoire. Mais ça, c’est du boulot. En attendant, j’ai vécu un bon moment.

Virtuelle randonnée

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Voilà, c’est fini. Peut-être que la fin est un peu confuse… Le virtuel, le réel, les espoirs, les regrets, les souvenirs et la nostalgie…. Bon et maintenant, qu’est-ce que je vais faire de ça?

Virtuelle randonnée

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Virtuelle randonnée

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Virtuelle randonnée

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Certains(es) reconnaîtront cette image, dessinée dans la chaude quiétude d’un chalet des Laurentides alors que, derrière le double-vitrage, lacs et forêts se pelotonnaient sous la neige que d’aucuns comparent souvent à un blanc manteau. Pour moi, ce devait être un blanc linceul. On a les clichés qu’on peut…

Virtuelle randonnée

J’ai terminé cette aventure, définitivement (il y a eu des retouches pour une ou deux cases très mal réalisée)la semaine dernière, mais je publie par fragment pour tenter de ménager quelques suspenses.

Virtuelle randonnée

C’est le début d’une série d’images dessinées à Montréal Québec. Les érables avaient perdu leur graines (samares) depuis longtemps. Mais rassurez-vous l’histoire va se poursuivre.

Virtuelle randonnée